Recension

MARTIN, Jean (2022) : Dites à l’avenir que nous arrivons.  BAUDIN, Mathieu. Ed. Alisio, 2020, 191 pages p. EAN13 9782379350955

Mathieu Baudin, historien et prospectiviste, dirige actuellement l’Institut des Futurs Souhaitables (IFS), un « Think Tank » dont la vocation est de diffuser des nouveaux savoirs répondant aux enjeux actuels, notamment au plan écologique et de la durabilité. Avec le but de « réhabiliter l’attention et la prise en compte du temps long » dans les décisions prises à tous les niveaux et de nourrir le débat public.

Il publie un guide étoffé, conceptuel et pratique, avec d’utiles notations historiques, sur les manières de construire de nouveaux futurs. « Nous vivons en ce moment une sorte de guerre entre les tenants d’un système dépassé (d’hyper-exploitation des ressources, production et consommation), d’une part, et les apôtres de l’effondrement – raillant les tentatives de bifurcation ». Entre les deux, la voie est étroite mais il importe de la trouver.

Qui contesterait que nous avons trop négligé la question du sens, dans sa double acception de direction et de valeur, dans nos existences et la marche de la société ? Il s’agit en premier lieu de changer notre regard, dit l’auteur, y compris le rapport que nous entretenons avec le vivant – considérer la complexité des connexions et interconnexions qui font la vie. Baudin : Peut-être est-il temps de signer des « déclarations d’interdépendances » – à propos de biodiversité, sécurité alimentaire, climat, énergie, finance mondiale… Soulignant sa conviction que « si le climat était une banque, on l’aurait déjà sauvé »… c’est bien probable. Pour privilégier la vue à long terme, et après avoir lancé l’idée d’une Académie du futur, il propose la mise en place d’un Ministère du Temps Long.

Dans ces perspectives, l’IFS, « école de la réinvention » et incubateur, rassemble des innovateurs (conspirateurs positifs…), engagés toutes dans des démarches d’élaboration de manières nouvelles de vivre, profitant entre autres des apports du biomimétisme, en empruntant des chemins de traverse et en repérant les « signaux faibles ».

Sont traitées les nouvelles technologies et de leur place croissante. À propos de robots et d’intelligence artificielle (IA) : « La bonne nouvelle c’est que le développement des lA pose la question de l’essentiel (…) A côté du transhumanisme, ce délire très californien de vouloir rester dans la course avec la machine, il y a de la place pour du trèshumanisme. Au-delà du numérique, faire de nous des humains encore plus humains…

Citation du philosophe indien Krishnamurti: « Ce n’est pas un signe de bonne santé que d’être bien adapté à une société malade ». Dans pratiquement tous les scénarios de futurs souhaitables, émerge la question de la reconnexion entre humanité et nature. Non par militantisme mais par nécessité de survie.

« Dites à l’avenir… » bénéficie d’une préface de Joël de Rosnay, le scientifique et vulgarisateur connu, qui note qu’il y a plus de vingt ans que Mathieu Baudin voyage entre futur, passé et présent, pour nous permettre d’imaginer demain. Patrick Viveret, philosophe altermondialiste, rédige la postface.

Cet ouvrage est très bien informé des groupes et démarches en France poursuivant des travaux dans ces domaines.  Lecture stimulante avec un caractère décentrant, par la description d’initiatives qui peuvent nous mettre en route vers un avenir plus équilibré et durable.

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