Recension

MARTIN, JEAN (2025) : Résister. SAQUÉ, Salomé (2024). Ed. Payot, 144 p. ISBN 978-2228937597

 

 

Menaces sur la démocratie, besoin de nouveaux récits

Jeune journaliste française, Salomé Saqué est très active sur Blast, souvent en débat à « C ce soir » sur France 5 ; une vraie militante en faveur des bonnes causes, notamment le climat, bien connue depuis la parution de son livre « Sois jeune et tais-toi – Réponse à ceux qui critiquent la jeunesse « [1].

Elle vient de publier un nouveau petit opus, « Résister »[2]. Consacrant sa première partie à décrire en détail la très inquiétante montée de l’extrême droite en France, l’auteure suggère d’y résister par la militance, sur plusieurs créneaux dont les enjeux climatiques et la biodiversité, tout en concédant ne pas avoir encore trouvé la panacée, dans cette entreprise pour le moins roborative.

Quelques extraits et commentaires :

Deux citations d’anciens « Tout peuple qui s’endort en liberté se réveillera en servitude  » (le philosophe Alain )[3]. » Le monde ne sera pas détruit par ceux qui font le mal, mais par ceux qui les regardent sans rien faire » (Einstein).

Pour l’auteure, s’intéresser à la marche du monde hors tout parti politique, c’est aussi faire œuvre politique, évidemment et à juste titre. En réalité, tout est politique dès lors qu’on s’engage dans la vie de la cité (la  » polis » – Cité-Etat en grec) et qu’on se préoccupe de la chose publique (« res publica », la république).

D’ajouter « En tant que quatrième pouvoir, le journalisme peut et doit défendre les valeurs auxquelles les démocraties sont attachées » (p. 87) et de mentionner à propos des fake news, une superbe citation attribuée à Mark Twain (bien avant l’époque de la post-vérité et de ses technologies) « Un mensonge peut faire le tour du monde le temps que la vérité mette ses chaussures » (p. 61).

Salomé Saqué plaide pour que nos sociétés ne soient pas tentées « d’essayer l’extrême droite », comme certaines en Europe semblent trop prêtes à le faire (encore tout récemment l’Allemagne, parmi d’autres nations). La banalisation croissante de celle-ci et des messages qu’elle véhicule (lesquels ne nous choquent plus comme ils le devraient), contribue à sa montée en puissance, dans « un cercle mortifère ».

Un rappel majeur emprunté à Albert Camus  » La démocratie, ce n’est pas la loi de la majorité, mais la protection de la minorité »[4]. Les Suisses le savent/devraient le savoir, puisque c’est en principe une des règles de ce pays.

Dans une section « Savoir convaincre » (p. 91 ss.), l’auteure traite utilement des bonnes manières d’aborder une conversation/débat avec des personnes peu intéressées, indifférentes, voire opposées. Avec d’autres dont Cyril Dion, elle souligne l’importance de créer de nouveaux récits, de proposer une alternative qui ne soit pas seulement une critique mais une révolution du vivre ensemble. Des tentatives sont en cours mais il y a encore beaucoup de pain sur la planche. Elle dit sa conviction que « Les grands bouleversements sont nés dans la tête des rêveurs. Les droits civiques, l’égalité des sexes. Des utopies devenues réalités. Alors on continue de rêver avec combativité, et on rêve grand (…) Cette réappropriation du monde par l’imaginaire, par la créativité, constitue le préalable à nos révolutions futures et la force de résistance contre les élans de repli et de haine » (p.104-109).

Créer du lien est plus que jamais devenu un objectif fondamental.

Soyons joyeux, dansons ! « La joie n’est pas une faiblesse, c’est un acte de résistance. Pendant que l’extrême droite ressasse le passé, on invente l’avenir ».

Toutefois, on le sait, les burnouts militants, cela existe. Très bon conseil « On peut résister en prenant soin de soi, comme de celles et ceux qui luttent ».

Et son mot de la fin « Ce livre a l’ambition d’être une petite pierre au pied d’un immense édifice de résistances plurielles, qu’il faut consolider et inventer ».

On lui souhaite de fonder de nombreuses autres pierres … à l’édifice du futur.

[1] Coll. Essais Payot, mars 2023, 320 p.
[2] Coll. Essais Payot, octobre 2024, 144 p.
[3] Nouvelle Revue Française, 1920 (1, p. 187-188).
[4] Camus, A. (1957) – Réflexions sur la peine capitale, Calmann-Lévy, coll. « Liberté de l’esprit », Paris, 1957, 245 p.

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Version pdf : Recension – Résister

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