LONGET, René (2025) : La bonne gestion de la nature, socle de notre prospérité. Agefi, 16 janvier 2025

Les ressources de notre planète Terre ont paru longtemps inépuisables, immenses, à l’échelle humaine du moins. Jusque il y a quelques décennies, on ne se préoccupait guère de la santé des systèmes naturels qui nous assurent de disposer d’eau propre, de sols fertiles, d’une abondance d’espèces animales et végétales, d’un air respirable et d’un climat vivable, de nombreuses matières premières et de sources d’énergie. Tout cela nous semblait aller de soi, la question étant de comment se les approprier.

Voici un bon demi-siècle, le Club de Rome avait posé la question – inouïe jusque-là – des limites de la croissance. Dès lors, la conscience – ou la mauvaise conscience – de la fragilité de nos façons de faire nous accompagne. Car, si dans la nature, tout se transforme, rien ne se perd, tout se recycle, nos fonctionnements sont encore largement linéaires: on extrait, on produit, on utilise, on jette – au besoin en promouvant l’obsolescence des objets. Ainsi se dégradent à un rythme croissant les richesses de la nature en rejets et en pollutions de notre environnement.

Davantage de ressources consommées qu’il n’en repousse

Depuis l’année 1970, l’espèce humaine, de manière très inégale d’ailleurs, consomme chaque année davantage de ressources qu’il n’en repousse (ou qu’on n’en recycle). Ces phénomènes sont scientifiquement suivis et mesurés par des indices comme l’empreinte écologique. C’est-à-dire le degré de dépassement de la capacité productive des territoires, dont les besoins sont dès lors pourvus par d’autres régions du monde ou sur le dos des générations futures.

C’est l’origine de l’exigence d’un développement durable, à savoir d’«un développement qui répond aux besoins du présent sans compromettre la capacité des générations futures de répondre aux leurs». Certes des efforts d’optimisation ont été engagés. Il n’en reste pas moins que selon l’Office fédéral de la statistique, notre empreinte écologique excède d’un facteur 2,5 notre juste part. Si bien que pour notre pays le jour du dépassement, soit le jour à partir duquel nous avons consommé cette part, était en 2024 le 27 mai – et le 1er août pour le monde.

Une exigence: s’inscrire dans les limites planétaires

Décrites dès 2009 par l’équipe de Johan Rockström de l’Université de Stockholm, les « neuf frontières planétaires » sont une autre manière de documenter les risques pesant sur nos conditions d’existence. Ce sont: le changement climatique, les atteintes à la biodiversité, la fragilisation des sols, les flux d’azote et de phosphore, le mauvais usage des eaux douces, les substances écotoxiques, l’acidification des océans, l’affaiblissement de la couche d’ozone et de la charge atmosphérique en aérosols. Les six premières sont désormais franchies et la 7e le sera prochainement.

On entend souvent dire que sans économie prospère, on ne pourra pas préserver nos bases naturelles d’existence. Mais n’oublions pas que c’est le bon fonctionnement des systèmes naturels qui fonde toute prospérité. Il est plus que temps de considérer qu’assurer ce fonctionnement est un investissement dans un facteur de production essentiel, et non une dépense dont on pourrait se dispenser

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